CHAPITRE 15
CHAPITRE 15.
Juillet, l'année précédente
(début du premier acte)
L'histoire revient tel un boomerang, en AR.
C'est un jour comme un autre, à Saint Paul, je termine une partie de la façade.
Comme toujours ceci se poursuit par le nettoyage des truelles, le balayage du chantier et le rangement des sacs et de divers outils.
On referme les portes avant une nouvelle session. Avant de rejoindre ma voiture j'ouvre ma boite aux lettres et découvre justement à l'intérieur un courrier.
Pas de timbre. Je suis intrigué. Peut-être un voisin mécontent...
L'enveloppe n'a pas été refermée. C'est peut-être ma mère.
Angélique aurait fait office de postière. Je sais qu'elle l'a déjà faite. Au moins une fois.
J'hésite, voisin ou mère ?
J'ouvre. « Le doute est un hommage rendu à l'espoir. »
Je déplie la lettre pliée en quatre. Lautréamont.
C'est ma sœur !
Elle m'apprend que la mère est en maison de retraite, qu'ils doivent vider l'appartement pour ne pas à avoir plusieurs loyers à payer et je crois que c'est tout.
Aucune adresse de cette maison, aucune date d'envoi et aucune date du déménagement.
J'ai cette sensation qu'il y a comme un hic dans cette histoire. Et comme je viens de perdre mon téléphone récemment je ne possède plus aucun numéro de quiconque.
Une maison de retraite ? Mais « Les maisons de retraite, c'est comme les colonies de vacances sauf qu'il n'y aura pas de rentrée des classes » sourit Patrick Timsit.
Je ne vois plus qu'une seule solution, passer par Alain. Bien sûr je n'ai pas son numéro de téléphone mais son adresse doit toujours être bonne. Je ne vois pas autre chose à faire. J'ai peur de ne pas être le bienvenu, surtout après notre dernière rencontre, mais je dois bien répondre à ma sœur, non ?
De retour à la maison je me mets à la rédaction de cette lettre.
Je sors la lettre de Joëlle. Je ne crois pas que ma sœur m'ait déjà écrit, enfin je crois.
Je remarque deux choses, outre les problèmes de date, un problème d'orthographe et là j'en ai voulu à mes parents et surtout trois mots, en guise de signature, d'une infinie bonté.
Elle terminait sa lettre par « Joëlle. Ta sœur ». Ce n'était pas rien.
Au moins j'étais encore un peu de la famille. C'est fou comme trois mots peuvent changer un tout.
« Les mots justes, trouvés au bon moment, sont de l'action. » Hannah Arendt.
D'ordinaire j'ouvrais ma boite aux lettres approximativement tous les quinze jours.
Je n'attendais pas vraiment de courrier hormis de l'administratif comme la taxe foncière ou l'assurance de la maison.. J'avais réglé le problème de l'eau et de l'électricité depuis bien longtemps. Peut-être dix ans, je ne sais plus.
Cette lettre, en réalité, je l'avais trouvée presque par hasard. En effet, j'étais en avance sur l'arrêt du car alors j'ai rangé un tas de pierre, débarrassé l'allée de certaines mauvaises herbes et fini par la boite. Depuis cette découverte j'essaie d'y faire plus attention et j'ai plutôt bien fait.
En quelques jours atterrissent deux nouvelles.
Je me dis que je dois voir ceci le plus positivement possible, un peu comme les propos de Marie Curie qui soulignait « Dans la vie, rien n'est à craindre, tout est à comprendre »
Je ne sais plus laquelle fut la première.
Angélique qui laissait sur un post-it ceci « Slt c'est Angélique. J'aurai voulu te voir. J'ai besoin de te parler. Peux-tu me joindre au 06...Merci » ou cette toute première lettre avec accusé de réception.
Une lettre avec AR ?
Jamais une bonne nouvelle normalement.
Mon hésitation n'avait pas changé : voisin mécontent ou mère.
Je pensais aussi à présent à un problème possible avec l'administration.
De toute manière, vu l'heure, il était trop tard pour un retrait à la poste du village.
A cette période je suivais une formation avec un organisme privé, ce style de formation où l'on peut se demander qui est qui. Des gamins de la classe moyenne.sans aucune expérience de la vie, devaient nous expliquer ce qu'était un travail et comment l'obtenir. Une mascarade, c'est surtout nous qui leur offraient un premier travail. On pouvait se demander également qui a le plus à apprendre à l'autre. Une histoire de piston, de réseau, je crois.
Suite ---> 0 1 1 2 3 5 8 13 21...
Je devrais attendre trois jours avant de remonter.
Sans vraiment vouloir le reconnaître je devais être stressé car ce fut une de mes arrivées les plus matinales. Je franchis le seuil de l'établissement il était neuf heures.
Mon hésitation était intacte. Je pensais souvent à un voisin, à l'administratif au sens large et parfois à une lettre, peut-être d'excuses ou de pardon de ma mère.
Je pensais beaucoup à cette dernière possibilité. Suite---- 2 10 12 17 18 19…
1 1 2 7 34 203...
Une dame faisait la conversation à la guichetière, j'attendais mon tour.
Je sortis ma carte d'identité et repérais rapidement sur ce courrier, qui allait vite me concerner, le tampon solennel « République Française ».
« Les liens invisibles laissent les marques
les plus profondes. » Isabelle Sorente.
Je sortis de la poste avec une enveloppe kraft.
Tout en refermant la porte je regardais un peu plus précisément le libellé et pu ainsi découvrir « République Française. Ministère de la justice et des libertés. Tribunal de grande instance ».
J'ai envie de dire, ça surprend. Et même plus. On a autant envie de l'ouvrir que pas, non ?
Mais l'envie de savoir est trop forte.
Je pensais attendre d'être à la maison mais je n'ai pas fait dix mètres que j'ouvre le document. Je lis en diagonale et j'apprends que la nature de l'affaire est un recours des tiers payeurs contre les débiteurs d'aliments et que l'audience est programmée au Palais de Justice le mardi trois octobre à quinze heures. On m'invite à apporter des justificatifs de mes revenus et de mes charges.
Je suis un peu sonné. Je ne comprends rien. Enfin si, je me dis qu'il doit s'agir d'une usurpation d'identité. Quand j'arrive chez moi je ressors le document.
De toute évidence il ne peut s'agir que d'une usurpation d'identité.
Je me dis que je suis mal barré. Ça c'est le style que chose que l'on peut traîner des années avec son lot d'emmerdes. J'ai vu plusieurs reportages sur ce sujet, j'ai bien conscience de tout. Quand on est dans la merde et bien on y reste voire on s'y étale.
La notice d'information, écrit plus petit, prend plus de place que la convocation elle même. Je prends le temps de la lire et en retire deux points qui me semblent importants.
D'après l'article 665-1 du CPC « Faute pour le défenseur de comparaître, il s'expose à ce qu'un jugement soit rendu contre lui sur les seuls éléments fournis par son adversaire » et d'après l'article 1141 du même CPC « Toute partie adverse peut aussi, en cours d'instance, exposer ses moyens par lettre adressée au juge, à condition de justifier que la partie adversaire en ai eu connaissance avant l'audience, par lettre recommandée avec demande d'avis de réception ».
Je me dis aussitôt que cette lettre peut-être mon salut. Je n'aurai pas à me rendre au tribunal.
C'est pour moi la seule bonne nouvelle de ce courrier. Mais ce courrier ne se limite pas à cet unique feuillet, même si celui ci m'a pris un temps certain. J'ai dû le lire au moins trois ou quatre fois.
A l'intérieur on me propose également de passer par une médiation.
C'est à la fin du courrier que je découvre la cerise sur le gâteau à moins que ce ne soit la cerise sur le cagot comme le racontait un célèbre humoriste. C'est la photocopie d' un courrier envoyé au juge, très récemment, de la directrice d'un institut de l' EHPAD. L'objet est la détermination de la participation des obligés alimentaires pour le paiement des frais de séjour de la mère.
J'y apprends que celle ci est entrée dans les lieux le 22 septembre et que le montant de ses ressources s'avère insuffisant pour acquitter seule les frais du séjour de l 'établissement.
J'y apprends également que « deux de ses enfants ne veulent ou ne peuvent assumer la prise en charge de leur maman. » C'est écrit tel quel ! On parle aussi d'un troisième enfant dont personne ne connaît la situation actuelle, je vous laisse deviner de qui l'on parle. Suivent les coordonnées des enfants : Joëlle, Alain et votre serviteur. Mais il y a une chose que je ne m'explique pas, en fin de liste, la petite fille Angélique et aucune mention de ses deux frères. Il y a comme un hic.
Pour moi, soit ce sont les trois soit c'est personne, je garde ceci en mémoire.
En fin de courrier la directrice demande que soit constatée la recevabilité de la requête, fixer l'obligation alimentaire pour chacun des débiteurs d'aliments à l'égard de madame et ordonner l'exécution provisoire du jugement à intervenir.
Le juge a reçu ce courrier en date du 30 juin. Bon, j'essaie de voir les choses du bon côté, pas d'usurpation d'identité, c'est déjà une bonne chose.
Maintenant je dois écrire à ce juge. 2 2 2 2 2 2
p = ( 2.k ) = 2 .q <---> 2q = 4 .k <---> q = 2 .k .
Dès la première lettre avec accusé de réception j'ai pensé à deux choses : Rédigez une lettre pour le juge et prendre rendez-vous avec un avocat.
L'écriture de cette lettre m'a pris énormément de temps, trop, et en plus je l'ai réécrite plusieurs fois
Le deuxième jour j'étais à ma table de rédaction dès six heures. J'aime bien travailler tôt le matin.
J'ai décidé de ne pas sortir pour terminer ce courrier assez long il faut bien le dire : Plus de sept feuillets en réalité. Bien sûr, souvent je faisais un break, le temps d'une émission radio ou télé.
Vers environ dix heures j'ai bien vu un petit rassemblement autour des voitures du parking mais je n' y ai accordé aucune importance.
A midi, j'ai déjeuné et à travers la fenêtre du salon, j'ai vu un couple qui semblait montrer une fourgonnette qui était garée par très loin de mon véhicule.
J'ai l'impression qu'il a dû se passer quelque chose ? Mais quoi ? Qu'importe, je dois finir cette lettre avant tout, avant de prendre rendez-vous avec l'avocat.
Enfin, à quinze heures j'ai terminé !
« Nous sommes le produit de nos erreurs mais, pour
ménager notre ego, nous appelons ça l'expérience. »
Alain Leblay.
J'ai regardé à travers la fenêtre, rien.
J'ai repensé à cette foule en mâtinée, ce couple vers midi alors je suis allé voir sur le terrain.
L'endroit semblait désert, pas un quidam à l' horizon.
J'allais rejoindre mon véhicule quand je vis tout d'abord une fourgonnette brûlée sur tout l'arrière. Les phares avaient explosé, une partie de la peinture pendait dans le vide.
A côté un emplacement vide mais avec encore de nombreux éléments totalement calcinés.
Et de l'autre côté de cet emplacement, aujourd'hui vide, mon véhicule avec les mêmes stigmates que la fourgonnette. On pourrait dire, avec un petit plus, car sur ma voiture le plastique est très présent et maintenant plus question de se servir du coffre. Pour les phares arrières le plastique a lui aussi fondu, par chance les ampoules fonctionnent encore. Je ne suis même pas surpris.
Ça rentre dans une certaine logique, celle qui devient la mienne.
« Le théâtre, c' est éphémère aussi. On ne laisse rien derrière soi, pas une pellicule, juste le moment présent, aussitôt évanoui. On n'existe que dans le souvenir de l'autre. » Aurélie Valognes.
Un résident, du haut de son balcon, m'avertit de ne pas attendre pour déposer plainte « Vous n'avez que quatre jours pour aller voir les flics et le déclarer à votre assurance ».
Je le remercie mais ce qu'il ne sait pas c'est que depuis trois mois je roule sans contrôle technique. La voiture a été refusée et pour les réparations on me demande huit cent euros, impossible.
Bien trop cher ! Je refuse d'engraisser les garagistes.
Je pense sincèrement que non seulement vous n'avez pas le droit de rouler mais aussi de stationner étant donné que vous devez obligatoirement changer votre voiture de place tous les sept jours.
Il me semble bien que ceci était inscrit au programme du code de la route, enfin je crois.
Après avoir constaté les dégâts, c'est a dire l'arrière calciné j'essaie de voir les choses du bon coté.
Les côtés du véhicule et le devant sont nickels. A l'arrière les pneus ont bien résisté.
Je me dis que la voiture doit fonctionner normalement, c'est sûr que quand on voit l'arrière...
J'ouvre la porte, je m'installe, je démarre, la voiture part au quart de tour.
Le lendemain, je ne me pose aucune question, je démarre la voiture et direction Saint Paul.
Désormais, fini la voiture en ville, je garde la voiture pour effectuer les trajets du car à la maison et de la maison au car. Une histoire de cinq kilomètres seulement.
Cinq kilomètres, cela peut paraître peu et pourtant je vous jure que c'est beaucoup. Je me suis retrouvé à plusieurs reprises sans voiture et je faisais la route à pied. Je ne suis pas le plus grand marcheur mais, en pleine campagne, et au milieu des montées et des descentes, à chaque fois cela me prenait au minimum une heure, parfois plus.
On rajoute une heure pour le retour, bref vous êtes crevés avant même d'avoir commencé.
Je redécouvre la marche, les horaires de bus et quand je monte à Saint Paul je dois mettre mon réveil à six heures pour espérer être là pour dix heures au plus tôt.
Pour le retour, c'est pire. Ça change, non ? Enfin, la voiture est sur place, le plein est fait et avec les petits trajets que j'ai à effectuer je devrais en avoir pour un bon moment.
Existe t-il des pompes d'essence à proximité ? Je ne le sais même pas. J'espère.
De nos jours les stations essence, et en première ligne les petits indépendants, ont tendance à fermer
Maintenant je dois accorder toute mon attention sur l'avocat. Seulement, il y a un autre petit hic, nous sommes en pleine été. Les deux structures que je connais, à savoir la Maison des Avocats et la Maison de la Justice, sont fermées.
Toutes les deux ont le même panneau affiché sur leurs portes
« Réouverture au public le 05/09 ».
__ __ __
V = V + V
° dr __
<-----> ----- + V
dt
_ _
<-----> dr + V . dt
° _ _ _
<-----> r = r + V . t
°
( à un vecteur constant près)
« L'action du théâtre comme celle de la peste est bienveillante,
car poussant les hommes à se voir tels qu'ils sont,
elle fait tomber le masque,
elle découvre le mensonge, la veulerie, la bassesse, la tartufferie. »
Antonin Artaud.
« En Marche » pourrait dire le Président...
Je prenais un premier bus, puis un car pour un voyage de quatre-vingt dix minutes et en guise de final, cinq kilomètres de promenade, bien loin des tilleuls et plus près des conifères. Idem pour le retour, c'est fatiguant.
Cinq kilomètres cela peut paraître peu et pourtant je vous jure que c'est beaucoup. Je me suis retrouvé à plusieurs reprises sans voiture... En pleine campagne et au milieu des montées et des descentes, à chaque fois cela me prenait au minimum une heure, parfois plus.
Quand arrive ce tout petit pond de pierre, je sais que derrière m'attend une forte, très forte montée. Attention aux fortes chaleurs ! Deux choses importantes à savoir, posséder un couvre-chef et éviter le créneau 12 - 15h
Sous ce petit pont coule un filet d'eau. Comment appeler cela autrement ? Après la pluie il arrive difficilement à faire plus de cinquante centimètres de largeur et quand le soleil affiche sa superbe...
C'est là où l'on retrouve ce petit, tout petit filet d'eau.
La photo a été prise fin avril, fin juin il n’y avait plus d’eau...
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